Le samedi 12 janvier 2008, le musée d’Art de Narbonne, situé dans le Palais des Archevêques, inaugurait deux superbes pièces nouvellement restaurées. La seconde pièce possède une galerie de portraits de certains Archevêques, restaurés eux aussi récemment. Le portrait de Claude de Rebé, archevêque de 1628 à sa mort en 1659, est d’auteur inconnu. Il a été cédé par don dans les années 1880 à la Cathédrale Saint Just. Mgr de Rebé arbore la croix de Chevalier du Saint-Esprit.
La ressemblance avec le portrait de Palairac est difficile à saisir de prime abord. Toutefois il faut tenir compte de certains facteurs :
- à Palairac l’évêque est mitré, on ne voit pas sa chevelure,
- il est vu de face à Palairac et légèrement de profil à Narbonne,
- le ton grave, plein de compassion, de Palairac fait place à un ton plus « hautain » ou « supérieur » à Narbonne,
- le visage à Palairac est un petit élément du tableau, alors qu’il constitue l’essentiel à Narbonne,
- il semblerait que les tableaux aient été faits à des âges fort différents du personnage,
- le regard cependant est similaire, les sourcis, et les paupières (les « poches » sous les yeux).
Concernant le mobilier de l’église, le XVIIème siècle semble marquer la mise en place d’une série d’oeuvres (statues, retables, autels) dont on ignore pour l’instant la provenance. Le fait que Claude de Rebé soit représenté dans le retable du maître autel incite à penser qu’il est le généreux donateur d’une partie de ce mobilier. Toutefois les archevêques de Narbonne n’ont jamais possédé le village, contrairement, par exemple, à Villerouge-Termenès. Alors pourquoi Mgr de Rebé est-il représenté à Palairac ?
Pour le conservateur des Objets d’Art de l’Aude, les deux Saints accompagnant l’archevêque de Narbonne sur le tableau étaient vénérés lors des périodes de peste du XVIIème. La première période la plus importante de ravage de cette maladie dans la région remonterait à 1629. Or le retable est daté de 1631 (soit trois ans après la prise de fonction de Mgr de Rebé). Les dates semblent donc correspondre. Le manque de blessure à la cuisse de Saint Roch est-il lié à des guérisons ?
Il est à noter que si vous visitez au palais des Archevêques, le musée d’Art, vous découvrirez des pièces créées à l’initiative de Mgr de Rebé (différentes des deux citées précédemment). Vous remarquerez qu’il aimait particulièrement afficher son blason. Paradoxalement, à Palairac, dans le retable, ses armes sont absentes.
Enfin, pour information, la famille de Rebé acquit en 1646 et garda pendant plus de 150 ans en propriété le château des Joyeuse à Couiza… Notamment la « chambre du Roi » (où probablement Louis XIII a dormi en 1642), salle où il y a une mosaïque romaine au sol. Levez les yeux au plafond. Vous découvrirez les superbes caissons peints par les frères Rodières sur ordre de l’archevêque. Ils représentent les neufs muses, avec Uranie (l’Astronomie) au centre. Dans plusieurs caissons vous apercevrez les armes de de Rebé (merles). A noter que le sceptre de Polymnie est un caducée accompagné d’un pétase non ailé. Certes le caducée est aussi un symbole de l’éloquence. Il représente donc dans ce cas la réthorique propre à cette muse. Mais un angelot porte par contre le caducée et le pétase ailé près d’Erato, alors que ce ne sont nullement ses attributs…
Ci-dessous deux blasons de Claude de Rebé. Le premier probablement d’avant 1633, l’autre postérieur à cette date. En 1633, l’archevêque reçut la croix de l’Ordre du Saint Esprit. Vous la trouvez dans le second, de même que la « croix de Lorraine ».