Le castrum

Situé au nord du village actuel sur un éperon rocheux disposé en terrasse, le castrum comprend un mur d’enceinte, à l’intérieur duquel se trouvait le village médiéval et le château proprement dit. L’ensemble est compris entre deux anciens chemins qui menaient à Lagrasse (visibles sur la photo aérienne).
Au nord, une plate-forme est séparée du castrum par un fossé creusé à même la roche pour assurer un minimum de défense.

plan castrum
Vue aérienne de Mr Guy Maillard (c)

Plan d’après les travaux de M. Gauthier Langlois

A enceinte du village médiéval
B enceinte du château
C emplacement du donjon
D emplacement de la citerne
E plate-forme septentrionale

a mur d’enceinte encore visible
b angle encore visible
c petite citerne ou coffre
d source
e emplacements de maisons
f entrées du castrum
g entrée du château

vue generale


Le donjon du château reposait sur la pointe de l’éperon rocheux. Il n’était pas bien grand (environ 4 m sur 4). Une falaise d’environ 20 m protégeait le flanc Ouest du Donjon. Au nord et sous le niveau du donjon se trouvait la citerne. Taillée dans le rocher on peut encore voir la forme ogivale de la construction et des traces d’enduit. Au bas du rocher sous le donjon, à l’ouest, on trouve trace, dans la paroi, des ancrages de niveaux (planchers, toits) d’anciennes cabanes médiévales. Le village du castrum s’étendait vers le Sud et l’Ouest depuis le château. Mais des vestiges de cabanes médiévales se retrouvent bien au-delà des murs d’enceintes du castrum, notamment en descendant jusqu’au ruisseau du Colomier. De tout le castrum peu de choses existent encore aujourd’hui. Le mur d’enceinte Sud est encore bien visible. Un angle sur la façade ouest avec petite fenêtre est également assez bien conservé, quoique les pierres de parement ont presque toutes disparu (réemploi pour les maisons actuelles…)
Les entrées probables du castrum se trouvaient essentiellement sur le flan ouest de ce dernier. L’entrée principale était peut-être au niveau du fossé creusé au Nord de l’éperon rocheux. Proche de cette entrée se trouve une source, ou plutôt une zone humide (petite flaque), située devant le creux d’un rocher. Par été chaud l’endroit s’assèche, mais le reste de l’année le niveau est plus ou moins constant. Comme le castrum était le lieu de traitement des minerais au Moyen-âge, la présence d’une mine très ancienne au château n’est pas impossible. Peut-être que cette résurgeance d’eau est issue d’un bout de galerie complètement bouchée aujourd’hui… Dans le même genre d’idée, des légendes concernant des souterrains partant du château étaient racontées par les anciens. Une faille géologique semble traverser le village dans le sens nord-sud.
Non loin de l’angle de l’enceinte assez bien conservé, cité précédemment, se trouve une petite citerne creusée à même la roche, ressemblant un peu à une auge à animaux.

mur
le mur d’enceinte du castrum
angle
angle ouest
donjon
emplacement du donjon
citerne
la citerne
ancrage
ancrage de poutres
coffre
petit coffre
source
la source

Pendant la période s’étalant de la confirmation par Charles le Chauve de la villa de Palairac à l’Abbaye de Lagrasse et le début du XIIème siècle, peu de textes concernent le village. La période couvrant les XIIème et XIIIème siècles donne beaucoup plus de renseignements, malgré certaines zones d’ombres.
Pendant cette période, les seigneurs de Termes, avec leurs vassaux, dont fait partie la famille de Palairac, se disputent avec l’Abbaye la seigneurie minière du Termenes.
En 1128, en reconnaissant leur usurpation, entre autres, de la seigneurie et du village de Palairac, les seigneurs de Termes font une restitution des biens qu’ils ont spoliés à l’Abbaye. Mais, dans la seconde moitié du XIIème, ils reprennent possession des mines et du village et, contre l’avis de l’Abbaye, décident de créer le castrum de Palairac, siège de cette seigneurie minière et gérée par la famille des « de Palairac » (des Bernard, Béranger, …).
Le 27 novembre 1191, une sentence arbitrale est prononcée par Bertrand de Saissac, entre Roger II Trencavel, vicomte de Béziers d’une part, et Pierre-Olivier et Raimond de Termes, Rixovende de Terme et son mari Guilhem de Minerve d’autre part, concernant la division de la propriété des mines de Palairac et du Termenès. Roger II réclamait la moitié de revenus miniers des mines d’argent de Palairac et il n’obtient que le quart. Cet épisode montre l’importance des mines d’argent du lieu (probablement pour une utilisation de frappe de monnaie dans ce cas).
Rixovende de Termes et ses cousins sont plusieurs fois excommuniés pour la création du château et l’usurpation des biens de l’Abbaye. Rixovende reconnait à son tour en 1208 sa culpabilité mais, de nouveau, elle ne rend pas réellement les biens que l’Abbaye possède sur Palairac. En 1210, la croisade contre les Albigeois amène Alain de Roucy comme nouveau seigneur de Termes. Il réclame bien entendu la possession de divers châteaux, dont Palairac, et la seigneurie minière, apparamment récupérés par l’Abbaye pendant la croisade.

Cinq ans plus tard, un accord avec l’Abbé de Lagrasse confirme enfin à Alain de Roucy la moitié du revenu des mines de Palairac (comme c’était le cas, en principe, pour les seigneurs de Termes avant lui) tandis que le château est conservé par l’Abbaye de Lagrasse. Réclamant encore ce château et après bien des procédures, Alain de Roucy le reçoit en viager avec la seigneurie de Palairac, et toujours la moitié des mines, mais avec restitution de ces biens à l’Abbaye après sa mort (1221).
Quatorze ans après la récupération de leurs biens par les seigneurs faydits, Olivier de Termes reconnait, en 1238, comme ses ancêtres, s’être aussi approprié le château et sa seigneurie et les rend à l’Abbaye. Deux années plus tard, la famille de Palairac participant à la rébellion du vicomte de Trencavel à Carcassonne, avec le seigneur de Termes, se voit confisquer le château et la seigneurie au profit du Roi. Malgré les réclamations de l’Abbaye pour récupérer le château de Palairac et l’ordre dans ce sens donné par Saint Louis à son Sénéchal, celui-ci ne lui est pas restitué. Saint Louis concède en 1255 à Olivier de Termes, pour services rendus à la croisade en Terre Sainte, tous ses biens anciens dont, probablement, la seigneurie et le château. Après les événements de 1240, la famille de Palairac ne récupère pas, elle, ses biens et finit dispersée dans des territoires autres que ceux du Roi de France.
En 1259, Olivier reconnaissant son utilisation effective du château et de la seigneurie de Palairac, propriétés de l’Abbaye de Lagrasse, celle-ci lui restitue les droits de ses ancêtres sur les mines de Palairac (1/2) pour bonne conduite. Cependant Olivier1, voulant repartir en croisade, céde définitivement à l’Abbaye la seigneurie et le château en 1260.
L’Abbaye de Lagrasse conserve ensuite cette seigneurie jusqu’à la révolution en confiant les fonctions de châtelain à des moines liés par serment à l’Abbé. Toutefois, l’Abbaye nomme aussi des capitaines issus de la population locale, avec une fonction militaire, pour préserver la seigneurie de divers dangers extérieurs (la guerre de 100 ans par ex). Jusqu’à la fin XVIIème, la voie de circulation menant de Carcassonne au Roussillon, passant par Palairac, était relativement fréquentée2, le château offrant encore quelque position de défense par rapport à ce passage. Cependant, dès 1653, par ordonnance du Roi, Mgr Claude de Rebé est chargé de détruire toutes les places fortes ne présentant plus d’importance stratégique. Les châteaux du Termenes, dont Palairac, sont concernés. Est-ce suite à cette décision que le château est considéré, dès le début du XVIIIème, comme ruiné ? Tous les matériaux servent alors au développement du village bas qui existe aujourd’hui. C’est pourquoi on retrouve de belles pierres d’angle sur certaines maisons actuelles ou encore des pierres sculptées parfois insolites…
Le 17 Août 1283, Philippe III le Hardi, Roi de France, et Jacques II, Roi de Majorque et frère du Roi d’Aragon Pierre III, se rencontrent à Carcassonne pour signer un traité instaurant l’aide du Roi de Majorque au Roi de France pour l’invasion du royaume d’Aragon. Il est à noter que l’entreprise, lancée en 1285, échoue entres autres pour une raison liée à une épidémie grave de typhus. Le lendemain, le 18 Août 1283, les deux Rois, Philippe le Hardi et Jacques II, se retrouvent à Palairac pour signer un traité de prestation d’hommage du Roi de Majorque au Roi de France concernant la baronnie de Montpellier.
Pourquoi être venu à Palairac pour signer ce second traité ? Palairac est situé à 65 km de Carcassonne. Deux Rois en voyage ne circulent pas seuls et au galop… Matériellement il était difficile de venir à Palairac et signer ce traité en une journée. Pourtant les parchemins authentiques existent : celui de Carcassonne et celui de Palairac du lendemain. Il était tellement plus facile de signer le traité sur Montpellier la veille en restant à Carcassonne…
Les deux Rois avaient donc une très bonne raison pour venir à Palairac faire la signature de ce second traité. Le traité lui-même ? Ou une autre raison que personne ne semble connaître …

Notes:

  1. Au sujet d’Olivier de Termes et l’histoire de la région, consulter l’ouvrage de Gauthier Langlois : Olivier de Termes, le cathare et le croisé ↩︎
  2. Au sujet d’Olivier de Termes et l’histoire de la région, consulter l’ouvrage de Gauthier Langlois : Olivier de Termes, le cathare et le croisé ↩︎

3 commentaires

  1. Is there a translation available in English? I have an ancestor, William de Colomer (spelled Colmore in England) whose family was from this area. William left for England in the year 1213 to serve the Angevin King John as a sergeant at laws.

    Thomas Adams
    31 Dartmouth Ave.
    Avondale, Georgia USA 30002

    1. Thank you for your comment. No, so far no English version of the text. However, to translate, you can add a translation extension to your web browser (e.g. google translate). Sincerely, Michel Rzepecki

      1. There are a few people in the nearby village of Tuchan called « Colomer », you can contact the town hall of Tuchan for more information (mailto:mairie@tuchan.fr).

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